Publié le 21/02/2021

Marseille : Le fort Saint-Jean, millefeuille architectural

Visite guidée au fort Saint – Jean. Classé historique depuis 1964, ce monument est par lui seul, un écrin du patrimoine de la ville de Marseille, témoin de l’Histoire de la cité phocéenne depuis plusieurs siècles. Destiné à un ordre religieux, sanitaire, puis militaire, il est aujourd’hui un lieu qui inspire à la curiosité et à la mémoire. Découverte de son Histoire avec Vanessa Hen, responsable du département des bâtiments et de l’exploitation.

Histoire Fort Saint Jean Mucem Marseille © Mathieu Houlliere

Monument historique et emblématique de Marseille, le fort Saint-Jean domine l’entrée du port de la ville depuis son promontoire rocheux.Véritable millefeuille architectural, il a traversé les époques et raconte à lui seul l’Histoire de la cité phocéenne. Aujourd’hui elle continue de s’écrire sur ses murs avec le MUCEM, dont il est le point de jonction avec la ville.

Le fort Saint-Jean : un patrimoine incroyable au carrefour de l'Histoire

Vue depius le Fort Saint Jean Mucem Marseille © Mathieu Houlliere

Du haut de la tour du Fanal, à près de 40 mètres au dessus de la mer, la vue sur Marseille est spectaculaire. Le Garlaban surveille au loin et les îles du Frioul tendent les bras. De là, on comprend mieux pourquoi une poignée de marins grecs - les Phocéens - décidèrent de s’installer dans la calanque du Vieux-port et d’y fonder un comptoir marchand il y a plus de 2600 ans maintenant.

« C’est un site incroyable, au sud, donc au soleil, à l’abri du mistral » Vanessa Hen, responsable du département des bâtiments et de l’exploitation pour le MuCEM.

En regardant vers les terres, trois collines et un promontoire rocheux marquent le paysage de la cité : les buttes Saint-Laurent, des Moulins et des Carmes, et le promontoire Saint-Jean. Ils conditionneront l’urbanisation de la ville qui devient rapidement l’un des plus grands ports de Méditerranée.

Massalia est née ...

À la fin du XIIe siècle, le site est concédé à un ordre d’abord religieux puis militaire : les Hospitaliers de Jérusalem. L’ordre de Saint-Jean construit sa commanderie pour acheminer les troupes vers la Terre Sainte.

« Pendant très longtemps, c’est d’ici que partait les croisades », précise Vanessa Hen.

C’est d’ailleurs en référence aux Hospitaliers que le fort et le quartier doivent leur nom. La commanderie est composée d’une chapelle dont les vestiges constituent le monument le plus vieux du fort aujourd’hui, mais également d’une église, d’un hôpital, ainsi que le palais du commandeur. L’ensemble est achevé en 1365.

Au XVe siècle, une guilde de marchands réussit à récolter des fonds qui permettent de venir construire la tour du Roi René entre 1447 et 1453. La tour, sur plan carré, s’élève à plus de 30 mètres au-dessus de la passe du fort et permet de contrôler encore un peu plus efficacement le port. Une chaîne qui relie le pied de la tour du Roi René au fort Saint-Nicolas est installée pour bloquer l’entrée au port. Dérobée par les Catalans venus piller Marseille, la chaîne est encore visible aujourd’hui dans la cathédrale de Valence en Espagne.



La construction du fort Saint-Jean : un acte politique

Mais c’est véritablement au XVIIe siècle que ne commence la construction du fort à proprement parler. À la suite de la rébellion des Marseillais contre le pouvoir royal (de 1658 à 1660), Louis XIV souhaite tenir la ville en respect. Il décide de construire des citadelles à l’entrée du port et le fort Saint-Jean est édifié de 1668 à 1671 par Louis Nicolas de Clairville et Vauban. Le complexe garde une vocation militaire jusqu’à la révolution, avant de devenir une prison d’état.

Pendant la Seconde Guerre Mondiale, l'armée Allemande a occupé le fort et en a fait un dépôt de munition. Lorsque ce dernier fut détruit en août 1944, l'explosion a causé la perte de nombreux bâtiments.
Le 16 juin 1964, le Ministère des affaires culturelles fait classer le Fort Saint-Jean monument historique.

Depuis 2012, la cité phocéenne a une utilisation plus culturelle du fort. En effet, il a abrité le Département des recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines (DRASSM), et depuis peu, le Musée des civilisations de l'Europe et de la Méditerranée (MuCEM). Son intégration dans le projet a donné lieu à un grand nombre d’aménagements : éclairage, accessibilité, ventilation, vidéosurveillance. Le fort est relié au nouveau J4 par une passerelle de 115 mètres de long, une seconde passerelle, d’une longueur de 70 mètres, est dressée entre le port et le parvis de l’église Saint-Laurent dans le quartier du Panier, assurant ainsi une continuité dans le parcours urbain entre la partie la plus ancienne de la ville. 

Longtemps oublié, il est redevenu un lieu de vie pour les Marseillais.

« Aujourd’hui, c’est un lieu de champs des possibles infinis. Je viens ici pour lire, pour ma sieste, pour m’y balader, pour y boire un coup, pour y acheter un ouvrage… pour y voir des expositions », conclut Vanessa Hen.