- Auteur Thierry de Lestang-Parade
- Temps de lecture 7 min
Hervé Bourhis raconte Paul McCartney
Entretien avec Hervé Bourhis, scénariste et dessinateur, à propos de « Paul, la résurrection de James Paul McCartney », une bande dessinée sur l’histoire de la fin des Beatles, la proximité d’un homme et de sa famille, qui vient d’être publiée aux éditions Casterman.

Paul McCartney, le bassiste des Beatles est le héros du dernier album en bande dessinée de Hervé Bourhis avec ce titre Paul, La résurrection de James Paul McCartney (1969-1973) paru le 9 avril 2025 aux Éditions Casterman.
"1969. « J’étais un demi-dieu, aujourd'hui je suis un chômeur. » Paul McCartney fait ce constat amer après la séparation des Beatles. Tandis que John Lennon fait la couverture du Time, Paul devient le méchant de l'histoire. Sans groupe, sans argent, détesté de tous, il trouve néanmoins la force de se reconstruire grâce à l'amour de sa femme Linda, de ses filles et de ses amis fidèles."

C'est donc la fin des Beatles qui est racontée ici dans la proximité d'un homme et de sa famille. Le lecteur découvre un être fragile et isolé qui tente de bâtir une œuvre en étant poursuivi par les moqueries des critiques. Ses albums ne seront réévalués que bien plus tard.
Paul, la résurrection de James Paul McCartney
Paul McCartney ne semble plus à la mode en 1969. Englué dans un procès, il bénéficie de l'aisance financière de son épouse Linda. Il apparaît affaibli en proie au doute.
Les méchants, ou présentés ainsi, sont souvent préférés aux gentils dans le rock. Les Rolling Stones ont longtemps cultivé une image sulfureuse pour séduire. L'album raconte un combat vital pour exister en multipliant les projets.
Paul McCartney est un survivant. Il a, sans doute, souffert longtemps de l'image un peu terne d'un barde sans aspérité aux côtés de John Lennon, plus politique, à la verve contestataire affirmée.

Les années ont passé. Paul McCartney s'impose plus que jamais par la délicatesse de ses mélodies et sa générosité sur scène.
Son Liverpool Oratorio, une œuvre classique nourrie des drames de la Seconde guerre mondiale, a pu être récemment joué avec l'Orchestre philharmonique de Monte-Carlo, au programme des concerts d'été au Palais Princier de Monaco, en démontrant que le génie de Sir Paul est sans frontière.
Hervé Bourhis, lauréat du prix Goscinny et Jacques Lob, a travaillé dans la presse. Il adapte une série animée pour la télévision French Pop. Il raconte sa passion pour Paul.
Rencontre avec Hervé Bourhis, scénariste, dessinateur pour "Paul, la résurrection de James Paul McCartney"

Votre album, très réussi, contient une révélation. En octobre 1969, Paul McCartney a été invité par télégramme à enregistrer aux Etats-Unis un album avec Miles Davis, Jimi Hendrix et Tony Williams , mais ne l'a pas reçu à temps. Mais de toutes les façons, ce projet n'a pas abouti.
Hervé Bourhis : L’info circulait depuis quelques années dans le milieu des fans de Beatles, et c’est même un journaliste français qui a révélé cette folle histoire. J’ai pu discuter avec lui, et le télégramme est désormais visible sur internet, je l’ai reproduit dans le livre. C’est vrai que si Paul l’avait reçu, l’histoire eut été différente.

L'étrange rumeur de la mort de Paul
On apprend aussi qu'une rumeur bien établie affirme que Paul McCartney serait mort en 1966 et qu'il aurait été remplacé par un sosie William Campbell. L'occasion pour vous de rappeler ce mot de Mark Twain, les rumeurs de sa mort sont très exagérées.
Hervé Bourhis : Ce serait un sosie génial, puisqu’il serait responsable de Sgt Pepper, Lady Madonna, Hey Jude, Let it be… Meilleur que Paul, finalement !
Vous avez tenu à rendre hommage à son épouse Linda qui joue avec lui sans savoir tenir un instrument mais qui savait le soutenir, notamment, financièrement.
Hervé Bourhis : Linda lui a sauvé la vie en l’intimant de partir avec sa famille en Ecosse fin 69 alors qu’il carburait au whisky dès le matin après la séparation des Beatles. Elle lui a apporté une assise, une famille, mais c’est aussi avec elle qu’il a travaillé jusqu’à la mort de cette dernière en 1997. Si c’était une débutante au clavier au début des Wings, elle est devenue très compétente par la suite, et chantait d’admirables harmonies vocales sur chaque chanson des Wings.

Une histoire incroyable
Pour une histoire de contrat, Paul McCartney avait intenté un procès aux autres Beatles et à un producteur. Il gagne le procès et dort 36 heures d'affilée. L'histoire est incroyable.
Hervé Bourhis : Le manager historique des Beatles, Brian Epstein, est mort en 1967. Paul est devenu le patron des Beatles par la suite, par la force des choses, les trois autres en étaient incapables. Mais en 69 John a décidé d’engager l’ancien manager des Rolling Stones, et George et Ringo l’ont suivi. Paul a refusé, Mick Jagger l’ayant informé des malversations. Paul a dû attaquer ses amis d’enfance pour casser l’entité Beatles et récupérer son argent. Et effectivement, Allen Klein était un escroc et a été condamné de nombreuses fois.

Qu'en est-il de la rivalité artistique avec John Lennon qui disait que Paul McCartney était un chanteur conservateur pour grand-mères ? Il y avait pourtant de l'estime entre les deux compositeurs.
Hervé Bourhis : Pas du tout de rivalité artistique, John aussi a fait des ballades sentimentales, et Paul des rocks violents. Ils se sont connus adolescents à Liverpool, chacun avait perdu sa mère très tôt, et ça les a lié pour la vie. Seulement à vivre les uns sur les autres pendant plus de dix ans, il y a un lassitude qui s’installe, c’est normal. En 1969, la trentaine arrivant, ils étaient devenus des adultes, avec femmes et enfants, avec de nouvelles priorités et des envies différentes.
Le paresseux et l'ambitieux
Paul McCartney est-il selon vous meilleur compositeur que Lennon ?
Hervé Bourhis : Non, pendant les Beatles c’est vraiment kif-kif. Mais je considère que Paul a fait une carrière solo plus solide que John. Ce sont des tempéraments différents, Paul est ambitieux et travailleur, John était plus paresseux. Extrêmement doué, il a vécu sur ses acquis et ne s’est pas remis en question alors que les temps et les musiques changeaient.

Un fin mélodiste
Quelle est sa place dans le panthéon de la musique ?
Hervé Bourhis : Je ne suis pas musicologue, je ne peux pas juger de ça. Je sais juste sa place dans la musique populaire, ce qui est autre chose. Lui et les Beatles ont eut un impact culturel monumental sur la seconde partie du vingtième siècle, influençant tout le monde, créant leur propre entreprise, lançant la mode de la world-music et des voyages orientaux de masse. Ils ont eu un message d’amour qui a influencé la jeunesse, un temps… McCartney est un fin mélodiste qui influence toujours les créateurs de chansons d’aujourd’hui, la preuve, Beyoncé a repris « Blackbird » sur son dernier album.