- Auteur Philippe Depetris
- Temps de lecture 4 min
Une rare intensité émotionnelle ! « Stabat Mater » de Vivaldi et Pergolèse par l’orchestre de l’Opéra Royal de Versailles à l’abbaye du Thoronet
Samedi 2 juillet 2025, les Musicales de l’abbaye du Thoronet ont offert un moment musical d’une intensité exceptionnelle. Le Stabat Mater de Vivaldi et de Pergolèse a résonné dans l’interprétation de l’orchestre de l’Opéra Royal de Versailles, porté par les voix de la soprano Sarah Charles et de la mezzo Ambroisine Bré, sous la direction inspirée de Chloë de Guillebon, également à l’orgue.

L’orchestre de l’Opéra Royal du Château de Versailles en concert dans le choeur de l’abbatiale de l’Abbaye du Thoronet ©Phillipe Depetris
Ceux qui n’auront pas eu la chance d’obtenir une place pour le concert donné par l’orchestre de l’Opéra Royal de Versailles en l’abbatiale du Thoronet auront peut-être manqué l’une des grandes dates de l’été en matière de musique classique sur la Côte d’Azur. En effet la venue de cette formation en tournée française après un périple triomphal aux Etats-Unis et au Canada constituait un événement que l’on doit au dynamisme et à l’énergie déployée par l’administrateur des monuments nationaux du Var Jean-Marc Bouré. Les 430 spectateurs qui emplissaient l’édifice ont donc assisté à une prestation éblouissante des interprètes qui ont su fort à propos tirer parti de la formidable acoustique de l’édifice, donnant aux œuvres exécutées une dimension quasi-mystique. Il n’était que de constater la qualité de l’écoute de ce public pour comprendre combien chacun avait été touché par cette interprétation magistrale.

« Stabat Mater » de Vivaldi et Pergolèse par l’orchestre de l’Opéra Royal de Versailles à l’abbaye du Thoronet
Il faut dire aussi que la composition du programme offrait aussi une belle opportunité d’entendre deux chefs d’œuvre du répertoire sacré, les « Stabat Mater » de Vivaldi et Pergolèse, Ces deux pièces emblématiques de la musique baroque italienne qui continuent d’impressionner les générations par leur profondeur, la spiritualité qu’elles dégagent et la beauté bouleversante de leurs thèmes évoquant la thématique de la méditation de la Vierge Marie au pied de la Croix.
« Stabat Mater » de Vivaldi
Dans la fureur de la plus juste colère
La soirée s’est ouverte par le motet « In furore iustissimae irae » RV 626 de Vivaldi (1720) auquel l’agilité vocale et la pureté du timbre de la voix lumineuse de Sarah Charles, une soprano couronnée par l’académie de l’Opéra Royal de Versailles qui a participé à deux programmes donnés pour la réouverture de Notre-Dame de Paris a donné toute son expression.
Nous y avons aussi découvert les cordes somptueuses de cet ensemble de l’Opéra Royal, unies dans une cohésion sonore et une écoute mutuelle qui équilibrent la virtuosité qui sied à ce répertoire sans jamais sacrifier à la musicalité. Sous la direction précise et intelligente de Chloë de Guillebon qui tenait également l’orgue du continuo, cette musique a pris d’emblée toute sa dimension.
Avec le célèbre « Stabat Mater » de Vivaldi se faisait apprécier la mezzo-soprano Ambroisine Bré. Intense dans la justesse d’appréhension des émotions suscitées par la partition, la belle voix d’Ambroisine Bré a épousé toute la dramaturgie de la pièce offrant avec la complicité des musiciens et de la cheffe à chacun des mouvements une couleur et un phrasé nuancés .

« Stabat Mater » de Pergolèse
La dernière œuvre de Pergolesi
Autre chef d’œuvre du répertoire baroque qui concluait la soirée, le bouleversant et célébrissime « Stabat Mater » P 77 de Pergolèse (1736) dont les interprètes, sans nul doute inspirées autant par la beauté de la partition que par le lieu exceptionnel dans lequel ils se produisaient, ont su exalter la puissance émotionnelle et le côté tant méditatif qu’opératique. Le dialogue des deux voix de Sarah Charles et Ambroisine Bré a résonné avec bonheur sous les voûtes de l’abbatiale dans cette fresque douloureuse née de l’inspiration géniale d’un compositeur de 26 ans qui terrassé par la maladie n’entendit jamais son œuvre. L’accompagnement attentif et l’écoute de Chloë de Guillebon et ses musiciens ont créé autour de ces plaintes exprimées par les solistes un écrin expressif et fusionnel qui a touché les auditeurs. Une magnifique et émouvante soirée !
Le festival Les Musicales de l’abbaye du Thoronet continue de rythmer la saison avec des concerts et une exposition, programmés jusqu’au 4 octobre 2025.