- Auteur Thierry de Lestang-Parade
- Temps de lecture 6 min
Musée Réattu à Arles : les Amis du musée soufflent leurs 20 bougies
20 bougies pour les amis du musée Réattu à Arles unis par le désir de célébrer l’ouverture culturelle ! Entretien avec Françoise Dumont, présidente de l’association, à l’occasion de l’anniversaire fêté ce samedi 27 septembre.

©Thierry de Lestang-Parade
Les amis du musée Réattu d'Arles ont célébré leurs vingt ans d'existence ce samedi 27 septembre 2025 en musique avec le concours du conservatoire du Pays d'Arles. Pour ces plus de deux cents adhérents passionnés, il s'agit de favoriser la promotion et le développement d'un lieu unique accueillant en 1965 le premier département de photographie dans un musée en France. Réattu, un musée municipal, dispose aussi d'une extraordinaire collection de tableaux dont plusieurs Picasso légués par le maître. Françoise Dumont, la présidente, présente l'association particulièrement dynamique.

Les 20 ans des Amis du musée Réattu à Arles
Entretien avec Françoise Dumont, présidente
Vous êtes présidente des Amis du Musée Réattu d'Arles, qui a fêté fin septembre 20 ans d'existence. Beaucoup de chemin a été parcouru.
Françoise Dumont : A l'origine, c'est une association qui a été fondée évidemment par des amateurs d'art. Je les ai rejoints il y a une quinzaine d'années, mais je n'ai pas connu certains membres fondateurs. Comme toutes les associations qui soutiennent les musées, nous sommes là pour contribuer au rayonnement du musée, pour l'enrichir, c'est-à-dire participer de façon financière à des restaurations, à des acquisitions, et puis faire connaître le musée par quelques moyens que ce soit.
Pourquoi avez-vous accepté de devenir présidente ?
Françoise Dumont : Lorsque je suis rentrée dans l'association, je suis restée très peu de temps inactive. J'ai pris en charge presque immédiatement les sorties mensuelles que nous effectuons dans les musées de la région. Elles sont choisies de façon tout à fait arbitraire, soit par conseil, soit par moi-même, soit par des membres de l'association qui me font des suggestions. J'organise également des conférences. Donc ça, c'était un travail que j'effectuais. Et au bout de deux mandats, notre précédente présidente m'a demandé de prendre sa suite.
Ce qui m'a semblé, j'avoue, un peu illégitime pour moi , étant donné qu'elle avait fait toute sa carrière aussi bien professionnelle dans les arts et aussi politiquement. Elle avait effectué deux mandats d'adjointe à la culture, alors que moi, j'ai travaillé dans un secteur financier qui était très éloigné de l'art, bien que je me sois évidemment toujours intéressée à ce domaine.

Une ouverture vers l'ailleurs et la photo
Quelle est la particularité du musée Réattu ?
Françoise Dumont : lI y en a a plusieurs. D'abord, le musée Réattu se situe dans une commanderie de l'ordre de Malte dont la base est du XIIe siècle. Jacques Réattu l'a acquise. C'était un peintre fin 18e, début 19e, lauréat du Grand Prix de Rome. Jacques Réattu a acquis une maison à Arles, puisqu'il était Arlésien, pour en faire son atelier. Et puis ensuite, il a acheté un deuxième hôtel particulier. C'est un musée des beaux-arts qui abrite des collections classiques.
Nous avons un Simon Vouet, des tableaux classiques, un très beau Christ du XIVe. Le musée a été un des premiers à présenter de l'art moderne et contemporain. A la fin de la Seconde guerre mondiale, le conservateur Jacques Latour qui était le fils d'un artiste, Alfred, a introduit l'art moderne, l'art africain, notamment, au grand dam des Arlésiens qui lui ont conseillaient « d'ouvrir un musée à Conakry en Guinée ». Donc, ça a été très, très violent. Il a fait une exposition aussi de Vincent Van Gogh.
C'était une œuvre vraiment pionnière cette ouverture à l'art moderne, africain ... ?
Françoise Dumont : Oui, tout à fait, parce que c'était jusque-là des Beaux-arts, des Arlésienneries, des œuvres réduites à Arles. Et puis, il a également introduit l'art contemporain, donc des artistes qui étaient post-guerre. Il était en très mauvaise santé parce qu'il sortait de Dachau et il est resté très peu de temps. Et puis, il y a eu une telle cabale contre lui.
Une violence contre un pionnier de l'art

Bethsabée à sa toilette restaurée
grâce au mécénat des amis du musée
©Thierry de Lestang-Parade
À cause de son ouverture culturelle ?
Françoise Dumont : Absolument, ça a été d'une grande violence. Les Arlésiens ont écrit au directeur des musées de France pour dénoncer ce qu'il exposait. Et Gaston Defferre l'a appelé à Marseille pour diriger les musées. Malheureusement, Jacques Latour est mort très jeune d'une crise cardiaque. C'est un homme qui a beaucoup souffert, parce qu'il a souffert à Dachau et dans sa vie passionnée par l'art. Mais c'était un novateur. Il avait un œil, une vista comme on dit.
Il a un autre aspect caractéristique du musée Réattu, la mise en lumière de la photographie. C'est surtout grâce à Lucien Clergue, le photographe arlésien, Jean-Maurice Rouquette, le successeur de Jacques Latour, qui était conservateur, et Michel Tournier, l'écrivain qui viendra après . Grâce à Jean-Maurice Rouquette et Lucien Clergue, cela a été le premier musée de France à exposer des photos.
Parce que Lucien Clergue est allé au MoMA à New York pour aller voir les collections de peinture. Il y a apprécié un département de photos. De retour, il a dit à son copain conservateur: il faut absolument que l'on expose la photo. C'est comme ça qu'est née la collection. Ils ont écrit à tous les grands photographes internationaux pour demander des œuvres. Il y a aussi au musée une belle collection d'oeuvres de Picasso.
Alors, Picasso, justement ?
Françoise Dumont : Picasso s'était épris d'Arles grâce à la corrida. Il adorait ce musée qu'il connaissait déjà. Il a fait don de certaines œuvres de son vivant. Et notamment, un jour, il a donné une cinquantaine de dessins qui sont exposés, évidemment, en rotation, puisqu'on ne peut pas les montrer en permanence.
Après sa mort, Jacqueline Roque, sa veuve, a fait don au musée du portrait de la mère de Picasso de la période bleue. Un portrait magnifique.
Bien d'autres œuvres de Germaine Richier, Zadkine, André Marchand, Lee Miller et d'autres artistes motivent une visite dans ce lieu gorgé d'histoire.
Association des amis du musée Réattu, amisreattu@gmail.com