Publié le 11/03/2024

Renaud Capuçon : la passion du partage !

“Samuel Barber par Renaud Capuçon”. Rencontre avec le violoniste, professeur, chef d’orchestre, directeur artistique, que l’on ne présente plus, invité par l’Orchestre national de Cannes, sous la direction musicale de Benjamin Lévy, le 18 février dernier .

Interview Renaud Capuçon Festival de Paques 2024

© Simon Fowler

Violoniste français virtuose, acclamé sur les plus grandes scènes du monde, partenaire des musiciens, chefs et orchestres les plus réputés, Renaud Capuçon vient d’interpréter ce dimanche avec brio à l’auditorium Debussy du palais des Festivals de Cannes le concerto opus 14 de Samuel Barber avec l’Orchestre National de Cannes dirigé par Benjamin Lévy. Fondateur et directeur artistique du Festival de Pâques d’Aix-en-Provence et du Festival « Les Sommets Musicaux de Gstaad », professeur de violon à la Haute École de Musique de Lausanne, il a pris en 2022 la direction artistique du Festival des Rencontres Musicales d'Évian. Depuis septembre 2021, Renaud Capuçon est directeur musical de l'Orchestre de Chambre de Lausanne. Il est également le fondateur de « Beau Soir Productions », une structure qui accompagne de jeunes talents dans les premiers pas de leur carrière. 

Sur son Guarneri del Gesù « Panette » (1737), le violon qui fut celui d’Isaac Stern, Renaud Capuçon continue avec passion à charmer les publics du monde entier avec ce bijou d'instrument.

Samuel Barber, par Renaud Capuçon, avec l'Orchestre national de Cannes

Vous connaissez bien l’Orchestre national de Cannes ?

Renaud Capuçon : J’ai eu plusieurs fois l’occasion de jouer avec cette formation et je me réjouis d’avoir partagé ce moment avec Benjamin Lévy ses musiciens et le public du palais des Festivals de Cannes.

Pourquoi avez-vous choisi ce concerto de Barber ?

Renaud Capuçon : J’ai découvert ce concerto de Samuel Barber sur un enregistrement qu’avait réalisé Isaac Stern, ce qui est très émouvant pour moi parce que Stern le jouait sur ce violon qui est à présent le mien. Je l’avais réentendu dans l’interprétation de Gil Shaham. Ses deux premiers mouvements sont très chantants, très mélodiques et génèrent beaucoup d’images. Le final est très virtuose. Ce concerto assez court est assez peu joué en France. Il est très plaisant à interpréter et j’aime explorer d’autres répertoires que ceux que l’on a coutume d’entendre.

On vous a retrouvé également le dimanche 10 mars sur la scène de l’Olympia. Ce n’est pas commun ?

Renaud Capuçon : C’est la deuxième fois que je joue dans ce cadre inhabituel pour un musicien classique. J’y avais donné un concert à l’occasion de la sortie de mon premier disque autour des musiques de films. J’ai à nouveau choisi cette salle à l’occasion de la sortie de mon second CD sur cette thématique de musique et cinéma. Cela me permet d’aller à la rencontre de nouveaux publics avec des répertoires que j’aime et qui, pour être populaires, n’en sont pas moins de formidables compositions. Ce concert marquera le lancement de mon nouvel enregistrement consacré avec l’ensemble « Les Siècles » sous la direction de Duncan Ward à des musiques de films emblématiques tels Lawrence d’Arabie, Love Story, l’Affaire Thomas Crown, les aventures de Rabbi Jacob…. Je rends hommage à des compositeurs français de grand talent tels Georges Delerue, Sarde, Michel Legrand, Vladimir Cosma, Alexandre Desplat, Maurice Jarre ou Philippe Sarde…Ces partitions sont des chefs d’œuvre de finesse et d’élégance qui génèrent l’émotion. J’ai été marqué par exemple par le « Concerto de l’adieu » de Delerue qui illustre le film de Pierre Schoendoerffer  « Dien Bien Phu ». J’y ai aussi une pensée émue pour Jacques Chancel en interprétant le célèbre générique de « Radioscopie ». Côté enregistrement je sortirai aussi en juin chez Deutsche Grammophon un album consacré à Fauré avec mon orchestre de chambre de Lausanne.

Renaud Capuçon et Philippe Depetris, notre journaliste

On va vous retrouver bientôt sur d’importants événements ? Quels sont vos coups de cœur ?

Renaud Capuçon : Je me réjouis de retrouver le public au festival de Pâques d’Aix-en-Provence du 22 mars au 7 avril 2024. Ce festival a maintenant 11 ans, et c’est un moment particulier de rencontre avec un public fidèle et des temps forts comme la venue de mes amis violonistes Gil Shaham et Pinchas Zukerman, la messe en si mineur de Bach avec Raphaël Pichon, la venue de l’orchestre symphonique de Bamberg pour la deuxième symphonie de Bruckner. Mais en fait j’ai des coups de cœur pour tous les concerts et les musiciens que je choisis.

Il y aura ensuite les Rencontres Musicales d’Evian du 26 juin au 6 juillet 2024 un autre endroit privilégié où se réunissent les plus grands musiciens de ce temps dans la Grange au Lac bâtie par Antoine Riboud pour son ami Mstislav Rostropovitch. J’essaie dans chacune de mes programmations de m’adapter aux lieux et aux attentes du public et des interprètes. Nous sommes tendus vers l’inauguration en 2026 de la nouvelle salle « La Source de vie » qui sera plus spécifiquement adaptée à la musique de chambre. En attendant, nous avons rendez-vous avec sir Simon Rattle, l’orchestre de Paris et Klaus Mäkelä ou Jordi Savall

Tout cela est exaltant et réjouissant.

Dans le midi il y aura aussi cet été de beaux rendez-vous, le Festival des Heures musicales de Biot au printemps, le festival Notre-Dame de Vie à Mougins en juillet, les soirées musicales de l’Abbaye de La Celle (11 août) et les Soirées musicales de Grimaud (le 6 septembre) … Autant de beaux partages dont je me réjouis.

Où trouvez-vous l’énergie pour mener à bien toutes ces aventures ?

Renaud Capuçon : Dans la musique. C’est elle qui me nourrit et qui est au cœur de ma vie. J’essaie d’aller au bout de tout ce qui me permet de partager sans limite cette passion et cet amour de la musique avec mes contemporains de toutes générations. C’est ce qui me porte et qui m’anime. J’enchaîne les projets sans jamais ressentir de lassitude et toujours avec le même enthousiasme. Je ne m’ennuie jamais parce que j’ai soif de découvrir de nouveaux répertoires et de nouvelles émotions. J’apprends chaque jour et c’est ce qui me permet d’évoluer et de progresser car rien n’est jamais acquis. 

Vous êtes toujours aussi passionné par la transmission ?

Renaud Capuçon : Elle est essentielle. C’est en transmettant qu’on apprend. Plus on donne, plus on reçoit.  C’est vrai que je considère que ma mission primordiale est de transmettre ce que j’ai moi-même eu le bonheur de recevoir, aux générations qui nous suivent. C’est aussi le sens de ma démarche avec « Beau Soir Productions » ou avec les « Lausanne Soloists ». J’ai plaisir à conseiller les jeunes musiciens, à les accompagner et à les guider dans leur carrière, à leur apprendre à éviter les écueils et les fausses illusions, à garder leur lucidité et leur humilité….