Publié le 20/07/2023

La première de Vaison-Danses : du Béjart comme on l’aime

C’est le Ballet Béjart Lausanne qui a fait l’ouverture de la 27e édition du festival Vaison-Danses dans un théâtre antique noir de monde. Alors on a danse avec les sept danses grecques, et le boléro de Ravel dont le rôle de la Mélodie était confié à la danseuse historique Elisabeth Ros.

Danseurs du ballet bejart lausanne vaison danses 2023 - elisabet Ros

Le salut final du Béjart Ballet Lausanne sur la scène du théâtre antique de Vaison-la-Romaine – Festival Vaison Danses 2023 ©AA

Vu à Vaison Danses le 11 juillet 2023 au théâtre antique de Vaison-la-Romaine, le Ballet Béjart Lausanne.
Un moment très impressionnant et d’une certaine manière commémoratif : Pierre-François Heuclin, le directeur artistique, et le mécène suisse Léonard Gianadda avaient tenu à ce que cette première soirée accueille le Béjart Ballet Lausanne comme cela avait été le cas 27 ans auparavant lorsque, en juillet 1996, le même Béjart Ballet Lausanne avait dansé la Messe pour le temps présent sur  une musique de Pierre Henry, le jour de la création de ce prestigieux festival.

Vaison Danses 2023, du Béjart comme l'aime ...

Gil Roman, Alors on danse ! avec le Béjart Ballet Lausanne

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Au programme du Ballet Béjart Lausanne pour cette première de Vaison-Danses, qui a duré deux heures avec entracte, Gil Roman, le danseur et chorégraphe qui a pris la succession de Béjart à sa mort en 2007, a inscrit trois pièces : deux ballets de Béjart – Sept danses grecques et l’emblématique Bolero sur la musique de Maurice Ravel – et une de ses propres créations, Alors on danse… ! 

Sur une musique qui mêle jazz, musique contemporaine et chansons de Bob Dylan, Gil Roman a composé une suite chorégraphique « qui n’a d’autre sujet que le plaisir de danser ». Pendant la période difficile du Covid, la compagnie a eu envie de légèreté et c’est ce qui a poussé l’artiste à créer cette oeuvre en plusieurs tableaux et à la dédier au danseur qui incarnait le mieux cette idée de passion résistante à tous les obstacles de la vie : Patrick Dupond.

Sept danses grecques

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Sept danses grecques, créées en 1983 au City Center de New York sur la musique de Mikis Theodorakis célèbrent la Méditerranée. Certes on peut y voir les Panathénées ou un discobole en action, mais comme Béjart l’écrivait en 1983 : c’est un ballet « où la Grèce – au dire des Grecs – est d’autant plus présente que les emprunts à son folklore sont minimes et que les costumes, dépouillés, sont inexistants ».

Le Boléro - Béjart Ballet Lausanne - Elisabet Ros

Version 1928, première

Très attendue était la version devenue classique du Bolero qui s’est donnée une infinité de fois sur toutes les scènes du monde. De la première version représentée en 1928 à l’Opéra Garnier et chorégraphiée par Bronislava Nijinska, Béjart a effacé toute référence concrète à l’Espagne et à la taverne dans laquelle une femme aguiche les clients. Pas de costumes folkloriques, pas de décor réaliste, sinon en fond de scène la vue sur les arbres de la ville. Seul élément retenu : la célèbre table ronde et rouge déjà présente dans la version Nijinska. Pour l’anecdote, portée et dépliée par le personnel technique, son entrée sur scène fut saluée par le public comme faisant partie intégrante de la chorégraphie  !

1979, un "ballet réversible"

La question était de savoir qui danserait le rôle principal : un homme ou une femme ? Béjart avait expérimenté tous les cas de figure. D’abord une femme – Duska Sfinios, danseuse macédonienne – entourée d’hommes qui manifestement la désirent. Puis en janvier 1979, Maurice Béjart inverse les rôles pour en faire ce qu’il appelle « un ballet réversible » et c’est le danseur argentin Jorge Donn, qui est le premier danseur masculin à monter sur la table rouge, entouré de danseuses, avant que de proposer en juin de la même année une variante 100% hommes. 

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2023, le Bolero à Vaison Danses avec Elisabet Ros

Finalement en 2023, c’est la danseuse historique du ballet Béjart – Elisabet Ros – qui, sur la scène vaisonnaise, a endossé l’habit de la Mélodie, ce qu’elle a fait avec talent depuis vingt-six ans sous l’autorité, réelle ou intériorisée, du maître.

Vu la longueur du spectacle, il n’y pas eu de bord de scène en fin de spectacle. Mais à en juger par la longueur et la force des applaudissements, beaucoup se reconnaîtront dans les propos de Christine, spectatrice passionnée de musiques au pluriel : «  Ce qui est fabuleux dans ces ballets merveilleusement réglés, c’est que ça touche l’imagination, différente chez chacun, mais émouvante chez tous ».