Publié le 07/03/2023

Alexandrie – Futurs antérieurs – Au MUCEM

« Il était important de créer des ponts entre l’Antiquité et l’époque contemporaine en montrant notamment comment certaines problématiques vécues par les Alexandrins du passé trouvent encore un écho aujourd’hui. » L’exposition « Alexandrie : futurs antérieurs » nous invite à considérer l’histoire et le présent de la ville égyptienne sous un angle inédit, loin des mythes et des stéréotypes qui lui sont traditionnellement associés.

Alexandrie futurs antérieurs exposition Mucem - Maha_Maamoun_Domestic_Tourism_Beach

Maha Maamoun, Domestic Tourism I: Beach, 2005. © Courtoisie de l’artiste et Gypsum Galerie

Dans le cadre de la programmation des expositions 2023 du MUCEM, une exposition inédite autour de ‘Alexandrie – Futurs antérieurs’, est à découvrir jusqu'au 8 mai 2023 au bâtiment J4 du Musée des Civilisations de l'Europe et de la Méditerranée. Cette exposition d'art contemporain est exceptionnellement riche par le nombre de thématiques et par le nombre d’objets et de questions qu’elle suscite.

Alexandrie – Futurs antérieurs - MUCEM

200 artefacts, œuvres et objets et  seize artistes contemporains

L’exposition Alexandrie - Futurs Antérieurs du MUCEM présente des artefacts couvrant une période de huit siècles, entre la fondation de la ville par Alexandre le Grand (331 av. J.-C.) et l’avènement du christianisme (381 apr. J.-C.). Elle propose également des incursions dans des vestiges datant des temps byzantins, arabo-islamiques et modernes. À travers cette sélection de quelque 200 œuvres et objets issus des plus importantes collections muséales européennes, l’exposition met en lumière le patrimoine et l’héritage d’Alexandrie en abordant son organisation urbanistique, politique et religieuse, mais aussi la vie quotidienne de ses habitants ainsi que le rayonnement scientifique et philosophique de ce haut lieu civilisationnel du monde antique. L’exposition s’intéresse aussi à l’Alexandrie contemporaine.

Hrair Sarkissian, Background, 2013. Courtoisie de l’artiste © Hrair Sarkissian

Une ville marquée par une constante érosion écologique, sociale et politique, déterminée par son passé colonial et les tumultes de la mondialisation. Au fil du parcours de l’exposition, seize artistes contemporains élargissent notre regard avec des œuvres qui explorent la ville d’aujourd’hui, sa complexité et le paradoxe de ses représentations marquées par de constants allers-retours entre temps historique, temps actuel et temps imaginaire. On découvre ainsi une sélection inédite d’œuvres d’art contemporain (peintures, photographies, sculptures, installations audiovisuelles) dont trois spécialement conçues pour l’exposition par les artistes Wael Shawky, Jasmina Metwaly et Mona Marzouk.). En parallèle à l’exposition, deux programmes de résidences d’artistes ainsi qu’une série de rencontres et de conférences dans les villes des différents partenaires impliqués explorent les relations au patrimoine, à l’art et à l’urbanisme au sein des métropoles euro-méditerranéennes d’Alexandrie, d’Athènes, de Marseille, de Bruxelles et de Nicosie.

Relief de Ptolémée Ier, 304-30 av. J.-C. Calcaire.
Leyde, Rijksmuseum van Oudheden © National Museum of Antiquities, Leiden

Alexandrie – Futurs antérieurs, l'exposition du moment à voir au MUCEM

Nous avons rencontré Nicolas Amoroso, l'un des quatre commissaires de l'exposition Alexandrie -Futurs Antérieurs et nous rapportons ici un condensé de ses propos.

« Evoquer une ville comme Alexandrie, parler du Phare, de son rôle commercial, ici, au Mucem, avec vue sur la mer,  et à Marseille, elle-même fondée par les Grecs, cela donne une dimension supplémentaire à cette exposition, avec des jeux visuels offerts par une structure telle que celle du Mucem. » 

— Nicolas Amoroso
Nicolas Amoroso, co-commissaire de l'exposition Alexandrie Futurs Antérieurs - Mucem © Marie-Céline Solérieu

Un travail de titan pour une exposition colossale 

Quatre commissaires d’exposition pour un véritable travail d’équipe

Deux commissaires pour le volet antique, Arnaud Quertinmont et Nicolas Amoroso, et deux commissaires pour le volet contemporain, Edwin Nasr et Sarah Rifky. Le premier élément, nous précise Nicolas Amoroso, a été d’enlever un peu cette couche de vernis de l’Alexandrie, cette ville qui a fait fantasmer, la ville de Cléopâtre, celle des monuments colossaux, celle d’Alexandre Le Grand, afin de révéler ce qu’elle était réellement dans l’antiquité, à partir de traces concrètes, de témoignages archéologiques, historiques, et de confronter, dans un deuxième temps toutes ces questions avec la réalité contemporaine. C’est autour de cette connexion que le parcours et la scénographie ont été imaginés. 

Haig Aivazian, Rome is not in Rome – Stadion, 2016.
Fer forgé et cuir rembourré
© Haig Aivazian. Courtoisie Marrakech Biennale, photo : Jens Martin

Cinq grandes thématiques

Cinq grandes thématiques pour cette exposition Alexandrie - Futurs Antérieurs

La Ville, le Pouvoir, les Dieux, les Alexandrins et le Rayonnement avec des objets de l’antiquité et une sélection d’objets contemporains, d’œuvres, offrant des points de comparaison ou permettant de nourrir un débat autour de questions comme la circulation, comme la récupération d’un patrimoine, comme les problèmes de l’eau.

Plusieurs manières pour aborder cette exposition Alexandrie - Futurs Antérieurs

Partir des œuvres sélectionnées pour le contemporain, essayer de les comprendre pour voir par la suite à quelle réalité ancienne elle renvoie, ou s’intéresser d’abord aux artéfacts anciens, aux informations qu’ils véhiculent et voir comment des processus, des créations, des inventions typiques d’Alexandrie, ou des objets, des idées, des formes trouvent encore un écho aujourd’hui.

Bracelet au cobra, IVe siècle apr. J.-C.
Or.
Morlanwelz, Musée royal de Mariemont
© Musée royal de Mariemont

Futurs antérieurs

Le nom a été voulu en référence à la fondation d’Alexandrie, en avance sur son temps. On imagine les voyageurs de l’antiquité découvrant cette ville hors normes. Les différents régimes politiques en place ont véhiculé une vision d’Alexandrie futuriste mais, en fait, jamais concrétisée, d’où le titre. C’est pourquoi l’exposition a été voulue, non pas de manière totalement  chronologique, mais plutôt de manière thématique, avec des fenêtres qui permettent de voir d’autres périodes, époque médiévale, époque moderne ouvrant à d’autres périodes de la ville qui ne sont pas au cœur du propos mais très intéressantes. Voir comment l’image de Cléopâtre est diffusée, comment le rôle d’Alexandrie a perduré à travers le temps, permet de jeter des ponts entre ces deux extrêmes que sont l’antiquité et le monde d’aujourd’hui. 

Io accueillie par Isis à Canope, Ier siècle apr. J.-C. 
Fresque.
Naples, Museo archeologico nazionale di Napoli
© Alamy Stock Photo

Le Culte

La section dédiée au culte occupe une place importante comme celle qu’occupe Alexandrie dans les différentes religions : transition vers le christianisme, importance de la communauté juive, puis conquête de la ville par les Arabes. Les trois religions s’y retrouvent. Alexandrie est un lieu très spécial, un lieu où se mêlent traditions pharaoniques et traditions gréco-romaines qui donnent naissance à toutes ces images polymorphes et étonnantes qui vont circuler à large échelle. C’est également une cité qui montre des formes de cohabitation entre des Egyptiens, des Grecs, etc. Parmi ces populations, certains étaient juifs. L’exposition démontre comment il est possible de vivre plusieurs formes de culte dans une même ville, spécialement à Alexandrie où plusieurs quartiers les abritaient. 

Quelle vision de l’Alexandrie d’aujourd’hui ?

Nicolas Amoroso nous parle d’une Alexandrie moderne dont le passé antique ne se devine pas aussi facilement que lorsqu’on visite d’autres grandes villes qui ont une longue histoire comme Athènes ou Rome par exemple où se voient les différents pans de leur histoire. A Alexandrie, qui a connu un essor urbanistique aux 19e et 20e siècles, les vestiges du passé sont ténus. Les monuments ont été remplacés. C’est le cas du Phare. On peut voir la fameuse citadelle de Qaitbay du 15e siècle qui a utilisé des fragments du Phare pour sa construction, et d’autres fragments qui sont sous les eaux. C’est une ville où les éléments restent tout de même présents. Plusieurs sites peuvent être visités, mais le visage actuel rend peut-être parfois difficile la compréhension ce à quoi ils devaient ressembler dans l’antiquité.

Ahmed Ghoneimy, Bahari, 2011.
Capture de la vidéo.
Courtoisie de l’artiste © Ahmed Ghoneimy

Informations pratiques Exposition Alexandrie - Futurs Antérieurs au MUCEM

COMMISSARIAT :
Volet antique
Arnaud Quertinmont, conservateur des antiquités égyptiennes et proche-orientales au Musée royal de Mariemont
Nicolas Amoroso, conservateur des antiquités grecques et romaines au Musée royal de Mariemont

Volet contemporain
Edwin Nasr, écrivain, commissaire indépendant et chercheur
Sarah Rifky, conseillère curatoriale, commissaire à l’Institute for Contemporary Art de l’Université Virginia Commonwealth et doctorante

Conservateur référent Mucem : Enguerrand Lascols 

Scénographie : Asli Çiçek, assistée de Maxime Descheemaecker

Co-production : exposition organisée par le Musée royal de Mariemont, Bozar - Palais des Beaux-Arts, Bruxelles (30 sept. 2022—8 janv. 2023) et le Mucem, Musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée, Marseille.

Le Mucem est ouvert tous les jours sauf le mardi, de 10H à 18H.