Emilia Pérez, un film de Jacques Audiard (2024)

Comédie musicale, Thriller, Drame, "Emilia Pérez", le dernier film de Jacques Audiard, est un peu de tout ça. L'histoire est inspirée du roman Écoute de Boris Razon, où un personnage narco envisage une opération de changement de sexe, mais n'est pas une histoire vraie.
Date de sortie au 21 août 2024, "Émilia Pérez", avec dans le rôle principal, l'actrice Karla Sofía Gascón, comédienne trans, est toujours à l'affiche dans les salles de cinéma. (Durée du film : 2h10)

Emilia Pérez, un film choc de Jacques Audiard

Attention chef d’œuvre...
Climax visuel
Organique
Sidéral
Érotique
Dérangeant
Émouvant
Percutant...

Les superlatifs pleuvent pour cet opéra filmique flamboyant, choisi pour représenter la France à l'Oscar 2025 du meilleur film étranger. Il a également obtenu le Prix du jury et le Prix d'interprétation féminine collectif au Festival de Cannes 2024. 

Au clap de fin, on reste bouche bée sur la performance artistique de cet ovni cinématographique, de la scène d'introduction à la virtuosité de la scène finale , le niveau ne baisse jamais.

On est ému, touché, et emporté par tant d'audaces visuelles, un festival de couleurs, de sons et de chorégraphies, toutes maîtrisées de main de maître par le génial Jacques Audiard, qui à l'âge de 72 ans signe ici, peut être son plus beau film.

Synopsis

Surqualifiée et surexploitée, Rita use de ses talents d’avocate au service d’un gros cabinet plus enclin à blanchir des criminels qu’à servir la justice. Mais une porte de sortie inespérée s’ouvre à elle, aider le chef de cartel Manitas à se retirer des affaires et réaliser le plan qu’il peaufine en secret depuis des années : devenir enfin la femme qu’il a toujours rêvé d’être.

Lieu de tournage

Dans le film, une majeure partie de l'histoire se déroule au Mexique, mais seulement deux séquences ont réellement été tournées sur place - une scène d'intérieur et la scène finale de la procession.

Pour des questions de logistique, le tournage s'est déroulé presque intégralement dans les studios de cinéma de Bry-sur-Marne, dans le Val de Marne en région parisienne. 

Pour créer l'illusion, l'équipe de Jacques Audiard s'est tournée vers MPC Paris, une société spécialisée dans les effets visuels.

Comme l'informe le site officiel de la production, plus de 350 plans ont été tournés sur fond bleu. "Chaque rue, chaque décor extérieur, et parfois même intérieur, a nécessité des effets visuels numériques dans le film", peut-on lire sur le site. Les environnements virtuels, conçus pour évoquer un Mexique imaginaire, incluent des créations de bâtiments comme la maison de Emilia ou la prison, et des paysages entièrement recréés numériquement."

Comédie musicale, Thriller, Drame, "Emilia Pérez", est un peut tout ça

Une sorte de melting-pot transgénérationnel et/ou transgenre, mais surtout une audace qui paye avec pour la première fois une récompense à une comédienne trans pour l'actrice Karla Sofía Gascón.

Précisons que les deux autres actrices Selena Gomez et Zoe Saldana, ont reçu également un prix d'interprétation féminine commun au dernier Festival de Cannes.

On oubliera pas de sitôt la chorégraphie endiablée, de Zoe Saldana en smoking rouge sur une table lors d'un gala de bienfaisance.

Emilia Pérez, l'histoire du film en trois thèmes 

Transgenre

Une personne transgenre, ou trans, est un personne dont l'expression de genre et/ou l'identité de genre s'écarte des attentes traditionnelles reposant sur le sexe assigné à sa naissance.
Toutes les personnes transgenres ne se reconnaissent pas dans le système binaire homme/femme.

De Priscilla, folle du désert à Bambi ou encore The Danish girl en passant par Transamerica, ce n'est pas la première fois que les transgenres sont à l'écran...mais Karla Sofía Gascón, 52 ans, qui a entamé sa transition de genre à 46 ans, est vraiment éblouissante dans le rôle principal, celui d'un narcotrafiquant qui se sent profondément femme, et va changer de genre.

Elle est la véritable révélation du film et enverra un signal fort lors de la remise des prix à Cannes.
Karla Sofía Gascón dédiera son prix à "toutes les personnes trans qui souffrent". "Je veux que ces personnes arrivent à croire comme dans Emilia Pérez qu'il est toujours possible de s'améliorer", a-t-elle lancé sur scène.

Chorégraphies

C'est l'une des réussites du film, il n'y a pas que les américains qui savent filmer la danse, et à l'instar d'un West Side Story moderne, Jacques Audiard s'y colle avec Damien Jalet, le chorégraphe franco-belge qui est aujourd’hui incontournable sur la scène contemporaine.

Virtuosité intuitive, virevoltante, et novatrice dans le choix des pas de danse, ces chorégraphies s’invitent savamment dans Emilia Pérez. 

Jamais pour exagérer le trait mais plutôt pour accompagner délicieusement les intentions du metteur en scène dans le déroulement du récit.
Elles sont toutes empreintes d'énergie et d'une liberté totale, la scène du gala où Zoe Saldana monte sur une table et défie l'assistance avec une danse frénétique est mémorable.

La musique, Brassens et " Les passantes"

Comme pour les chorégraphies, Jacques Audiard a fait les bons choix et comment ne pas mettre en avant la qualité de la bande originale composée par le musicien Clément Ducol et la chanteuse Camille.
Ces génies de la musique ont parfaitement su mettre leur sens inné de la musicalité et de la rythmique des mots au service de chansons percutantes et mélodiques, qui sont toujours à propos et qui font avancer la narration de manière intelligente. Les morceaux non chantés participent tout autant à l'émotion qui se dégage du film, et un clin d'œil est donné pour la dernière scène à une chanson de Georges Brassens revisitée, "Les Passantes", dans une version espagnole.

Lors d'une procession finale à la mémoire d'Emilia Pérez, ce dernier chant choral conclut avec mélancolie cette épopée incandescente vers la résilience dont on peut prévoir qu'elle fera bouger les choses.

Merci Monsieur Audiard pour ce chef d'œuvre.